Fauché par une balle devant la présidence du Tchad

Haitassidi Hinim-Bayna Jérémie

Le 21 mars 2025, un jeune homme, âgé de 32 ans, le nommé, Haitassidi Hinim-Bayna Jérémie, a été froidement assassiné par la garde présidentielle en plein jour, devant la présidence de la République. Son tort est d’avoir emprunté la voie en sens interdit. Quelle cruauté !

SN Jean Luc

Dans la matinée du 21 mars 2025, les nouvelles qui circulaient sur la toile faisaient état d’un jeune tué  par la garde présidentielle, devant la présidence. Certaines langues venimeuses font comprendre que ce jeune serait certainement suspecté par la garde présidentielle, d’avoir une mauvaise intention contre le Palais rose. Quelques heures plus tard, on apprend qu’il s’agit plutôt de Haitassidi Hinim-Bayna Jérémie, un jeune Tchadien, âgé de 32, travaillant à l’étude de Maître Sammangassou Mahamat Bruno, en qualité de Comptable fiscaliste. Il trouve la mort devant la Présidence, lorsqu’il y passait à moto. Après que des voix se sont élevées pour condamner cet acte horrible d’un autre âge, le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de N’Djaména, Oumar Mahamat Kedelaye a fait une déclaration qui a frustré plus d’un.

Lors de son point de presse, tenu le 22 mars 2025, le Procureur a  indiqué que Haitassidi Hinim-Bayna Jérémie empruntait une voie à sens unique, interdite, en dépit des consignes données par les Agents municipaux. A en croire le Procureur, l’axe emprunté est celui interdit par la Mairie centrale de N’Djaména, à la suite des évènements du 8 janvier 2025. Allusion faite aux « Assaillants aux pieds nickelés de Koulamallah ». Pour lui, le défunt a ignoré et continué, sans tenir compte de ces consignes. En tentant de franchir une barrière de sécurité, il a été touché par balle tirée par la garde présidentielle, lors des tirs de sommation dans le souci de le dissuader et il a rendu l’âme sur place, a déclaré le procureur, tout en présentant ses sincères condoléances à la famille du défunt et appelant les usagers à respecter les règles de circulations mises en place, sans pour autant annoncer l’ouverture d’une enquête judiciaire sur le cas. Les faits se sont déroulés à 10 heures, a-t-il précisé.

Que de tâtonnement

La déclaration du Procureur de la République, censé situer les Tchadiens sur cet assassinat et ouvrir une enquête judiciaire pour tirer les choses au clair, n’est qu’une tergiversation sans le moindre fondement convainquant. Sa sortie apparaît, non seulement comme une insulte à la mémoire du défunt, mais comme un permis de tuer, accordé à tous ceux qui veulent bien tuer et qui le font d’ailleurs comme toujours, sans être punis. Les raisons pour lesquelles le jeune a été tué, comme évoquées par le Procureur de la République, relèvent d’une insensibilité inouïe et de l’inhumanité sans précédent. Car, à en déduire, emprunter une voie à sens unique interdite suffit de perdre sa vie. Comme quoi, c’est une ligne rouge, infranchissable, un piège tendu à un ennemi, plutôt qu’une consigne liée à la sécurité. C’est pire que d’autres cas d’assassinats crapuleux, commis par des malfrats et autres bandits de grands chemins.

Sans toutefois entrer dans les détails, s’il l’on s’en tient aux explications du procureur, tout porte à croire que celui-ci a simplement tâtonné. Le fait de dire que le défunt empruntait l’axe qui va de la Mairie vers la présidence et que les faits se sont déroulés à 10 heures, montre clairement qu’il n’était pas dans le sens interdit. En rappel, au terme de la décision N°01 de la Mairie, du 13 janvier 2025, il est instauré une circulation à sens unique sur l’Avenue Karim Nassour, à partir de l’intercession avec l’avenue Gaourang jusqu’à l’avenue Galmai. La circulation sur ce tronçon est interdite de 18 heures à 5 heures du matin. Se référant à cette décision et à la déclaration du procureur, le défunt n’a pas emprunté une voie à sens unique interdite. Dès lors, le motif de violation des consignes sécuritaires ne sied pas. Ce qui soulève l’inquiétude d’un acte posé à dessein. Et c’est à juste titre que Me Samangassou Mahamat Bruno exige des preuves en vidéo qui montrent clairement qu’il était dans un sens interdit et qu’il n’a pas obtempéré aux consignes des agents de sécurité.  A la fin de sa déclaration  le procureur demande aux tchadiens de respecter les consignes de la circulation. En d’autres, termes, « si vous ne respectez pas et que vous empruntez cette voie à sens unique interdite, on vous tuera, comme c’est le cas du jeune Jérémie ». La garde présidentielle, à la gâchette facile, prend ainsi acte. Comme tel, demain sera le tour des autres Tchadiens d’être également lâchement tués, sans autre forme de procès.

Pourtant, en réalité, même si c’est pour de mesures sécuritaires et que la garde présidentielle arrive à suspecter des individus avec une intention de déstabilisation des institutions de l’état ou d’atteindre la vie du Raï’s, la logique aurait voulu que ceux-ci soient interpelés pour le besoin d’enquêtes. Cela permettrait d’avoir des réelles intentions et d’autres informations sécrètes y relatives, pour mieux se prendre, si possible, de démanteler d’autres réseaux, s’ils existent. C’est aussi çà, les précautions à prendre. Or, dans ce cas de figure, le jeune étant seul et en plein jour, sans arme à la main, a-t-on besoin de le tuer ? Que justice soit faite pour ce jeune, lâchement abattu et que les auteurs répondent de leurs actes. Au cas contraire, ce n’est pas la peine de prétendre lutter contre l’insécurité alors que de l’autre côté on l’encourage.

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