Le Tchad de la 5ème République est soumis à une insécurité notoire. Entre braquages, agressions, vols, viols et toutes autres formes de violences, les populations de toutes les 23 provinces du Tchad ne savent à quel saint se vouer. Le cas de la cité capitale défraie la chronique.
Sougour Ndangmbété Jean Luc
Il ne se passe pas un seul jour où on ne parle pas d’agression à mains armées, de viol, de vol, d’enlèvement contre rançon, de trafic d’enfants, de conflits et d’attaques meurtrières ou de tout autre crime crapuleux. Des organisations de la société civile et bien d’autres associations, alertent sur ces multiples cas, appelant aux interventions urgentes des plus hautes autorités mais leurs voix ont toujours été inaudibles. Chaque jour pourtant, des cas d’insécurité sont signalés dans les différentes localités du pays. Il arrive même que les autorités en charge de la sécurité soient impliquées dans les cas de vol, de viol ou de crimes divers. Le dernier cas en date est celui du braquage au Marché central en plein jour, survenu en date du 12 mars 2025.
Selon les informations, autour de 15 heures, un Bureau de change à un jet pierre d’un Commissariat de sécurité publique, a été la cible d’un braquage perpétré par quatre hommes armés. Ces malfaiteurs ont réussi à dérober plus de 100 millions, sous les regards impuissants des cambistes. Au cours de la même semaine, d’autres cas de braquages ont été enregistrés à N’Djaména. A titre illustratif, un homme âgé d’une cinquantaine d’années, braqué également le 12 mars 2025 aux environs de 11 heures, par six individus armés, à bord de trois motos. Il a été grièvement blessé et sa moto emportée. N’eut été l’intervention des passants, sa vie lui serait ôtée. Un autre, détenteur de véhicule a été braquée, à 22 heures du 15 mars. Il a été également grièvement blessé et son véhicule de marque Hilux, emporté. Ces deux cas sont survenus dans le 8ème Arrondissement, et liste est longue. Ces actes rappellent le cas récent cas de dame Damaris, dont la vie a été ôtée, dans sa propre chambre à Gassi, dans le 7ème Arrondissement, puis sa moto et autres biens matériels emportés.
Le gouvernement, médecin après la mort
Il est de coutume que nos gouvernants ne se préoccupent pas du tout de la situation sécuritaire de leurs administrés. En dépit des cérémonials de présentation des malfrats, contre toutes procédures judicaires, que la Police nationale et la gendarmerie nationale à l’attention du public, les autorités semblent agir toujours en médecin après la mort. Plutôt que de s’inscrire dans la logique d’anticipation, par la mise en place des mécanismes pour contrecarrer les plans des malfaiteurs, le gouvernement attend que des cas surviennent pour ouvrir des enquêtes, pomper des communiqués ou procéder à la présentation des présumés malfrats à la presse, pour prouver qu’il veille effectivement à la sécurité des populations et de leurs biens. Quelle hypocrisie !
Plus décevant que cela paraisse, pour le cas du braquage survenu le 12 mars dernier au marché central de N’Djaména, ce n’est que le 15 mars, soit 72 plus tard, que le gouvernement sorte de son silence, par une sortie médiatique à travers un communiqué de presse, signé du ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement Gassim Cherif. C’était comme pour réparer un manquement, après que des voix se sont élevées pour critiquer son silence. Et dans tout cela, le gouvernement enfonce le clou en tenant des propos fallacieux comme si l’on était sur une autre planète, plus stable. « Le gouvernement de la République du Tchad condamne avec la plus grande fermeté le malheureux braquage, perpétré au Grand Marché de N’Djaména qui a suscité l’émoi au sein de la population. Il tient à informer que toutes les dispositions sont prises pour appréhender les malfrats dans les heures et jours à venir », écrit Gassim Cherif. Plutôt que d’apaiser les cœurs, cette sortie tardive a mieux fait d’attiser les ressentiments des cœurs déjà meurtris par cette série de cas d’insécurité qui peut atteindre n’importe qui, à n’importe quel moment et partout.
Plus loin, le gouvernement tchadien divertit, en faisant comprendre que les forces de l’ordre et de sécurité travaillent sans relâche à protéger les populations ainsi que leurs biens, des mesures fortes sont prises pour renforcer la présence des forces de l’ordre dans les zones de fortes affluences telles que les marchés et autres lieux de rassemblement. Et il appelle la population à rester calme, à redoubler de vigilance et de continuer à soutenir les efforts des Forces de défense et de sécurité dans leur mission. Malheureusement, la sécurité, la quiétude ou la paix contenues dans le premier chantier du programme politique du gouvernement ne sont que théoriques. Nous l’avions bien dit dans nos précédentes parutions. Ce n’est pas multiplier les commissariats de sécurité publique qui rassurera les populations tchadiennes de leur sécurité. C’est tout à fait le contraire. Comme pour nous donner raison, il se constate que, plus on implante les commissariats, les postes de police et brigades de gendarmerie, mieux les populations sont exposées à l’insécurité.
Les business d’abord
Si l’insécurité s’intensifie à N’Djaména ou dans d’autres provinces, c’est que, quelque part, les agents de la police surtout, bien que affectés dans les différents sous-postes des zones reculées, se contentent plutôt de jouir de leur autorité pour arnaquer et escroquer ceux qu’ils sont censés protéger. Il suffit de faire un petit tour dans les quartiers comme Gassi, Ambata, Boutalbagar, Sigueté, Abena et Atrone pour voir ce qui se passe. La nuit, au motif de la patrouille, les éléments laissent leurs zones de surveillance pour arpenter les rues et les grandes voies et narguer les paisibles citoyens. Ce qu’ils savent mieux faire, c’est demander aux motocyclistes les pièces afférentes aux engins, dans l’ultime but d’avoir de jetons. Aussi, c’est avec une véritable délectation qu’ils procèdent à l’arrestation de tous les motocyclistes qui roulent en sens inverse. Des pratiques prégnantes sur l’avenue Jacques Nadjingar, l’avenue Mathias Ngarteri ou l’avenue Taiwan.
Ce temps de vadrouille hors de leurs sphères de contrôle permet des agressions. Applaudies par le gouvernement, il est malheureux de dire que forces de l’ordre se complaisent plutôt aux business, sur le dos des citoyens, cuits entre cherté de vie et insécurité. C’est de cette manière que leur vie est sacrifiée. Pas de quiétude. Pas de liberté de circuler. Partout où l’on part, la peur est là. Ainsi va la vie des Tchadiens.